Poésie

Marâtre

femme en pleurs

De quel droit osez-vous vous monter contre moi?
Qui ai tant sacrifié, qui ai donné ma vie,
Qui vous ai tant aimé, comme mes propres filles!
Qui par amour pour vous ai bravé tant de lois!

Eussé-je pu donner d'avantage d'amour?
Eussé-je dû lâcher tous mes autres amis
Pour entendre de vous rien qu'un simple merci?
Aurais-je dû souffrir, ou vous donner le jour?

Je ne suis votre mère et ne le serai pas.
Mais j'aimais votre père et nous fûmes mariés,
Prétendant nullement avoir bien plus de droits.

J'espérais de tout cœur être un peu respectée.
Votre père est parti, je suis maintenant seule.
Ne pourriez-vous m'offrir autre appui qu'un linceul?

Pour une coupe

Coupe

La tension montant, il faut garder son calme,
Tout en restant actif, tout en jouant à fond.
Il faut tout oublier, les trophées et gallons,
Ne pas penser plus loin, oublier cette palme.

Ni futur, ni passé, ni autre distraction.
Le cerveau concentré sur cet instant présent,
Comme si tout autour disparaissait le temps,
Comme enfermé à part, coupé de tous les sons.

La pression dans ta tête est à son apogée,
Le sang chaud bouillonnant, martelant à tes tempes.
Ne pas penser au temps, oublier cette crampe.

Ton corps et ton esprit veulent tout deux lâcher,
Pourtant tu t'y opposes, te donnes jusqu'au bout,
Pour que demain tu dises: ça en valait le coup.

La veuve

Rose Blanche

Ton visage se voile et tu tournes la tête,
Ne voulant révéler cet instant de faiblesse.
Ces souvenirs montant, Mémoire qui te blesse,
T'empêchant de mentir devant ta mère inquiète.

Tes joues sont de rubis lorsque la flamme monte.
Sa perte te revient, tes yeux deviennent un fleuve.
Tu montes sur l'estrade, la belle et noble veuve,
Lorsqu'il te faut parler, tu sens venir la honte.

Pourtant injustifiée, sachant ton innocence,
Tu te demandes encore ce que tu as mal fait
Devant tous ces voisins, Sainte-Honorine-de-Fay,

La commune au complet, pour des condoléances.
Et tes mots sont coincés, refusant de sortir,
Car devant ce suicide, tu as son souvenir.

La bibliothèque

Vieux livres

En marchant au milieu de ces livres anciens,
En voyant là dedans la longueur du chemin,
Le savoir compilé, ordonné et rangé,
Livres usés par le temps mais jamais oubliés,

En observant, plus loin, sur la table entassés
Des feuilles mélangées, des idées travaillées,
En sentant l'odeur rance entourant un vieux pain,
Ce repas oublié lors d'un travail ancien,

En découvrant, là-bas, sous les faibles lumières,
L'ébauche d'un projet sur une plaque en verre,
Une œuvre délaissée en échange d'une chance,

J'admire les vestiges d'une vie repoussée,
Pour l'amour d'une femme, la chaleur d'un foyer,
Cet endroit est resté, Temple de connaissances.

Monde mélodique

Monde mélodique

Des touches de piano aux cordes des violons
S'élèvent de beaux sons formant de longs morceaux.
De la peau d'un djembé ou d'une caisse claire
Sortent de courts éclairs, la musique rythmée.

Des quatre coins du monde et de chaque maison
S'élèvent à l'unisson des chants, telle une ronde
Qui s'en irait tourner par delà l'univers
Pour qu'ici se resserrent nos liens d'humanité

Et nous qui sommes unis en tout temps, jours et nuits,
Transformons tous ces bruits en une Mélodie,
S'en allant dans les têtes de tous les malheureux.

Retrouvant goût aux jeux, qu'ils aillent à la fête
Écoutant la musique, suivant les pas de danse,
Créant la belle ambiance de ce monde utopique.

Le cerf

cerf

En allant calmement sur la route enneigée,
Je vis des marques rouges et des traces de pas.
Ces traces n'étaient pas des traces de souliers,
Elles étaient animales et n'avançaient pas droit.
Le rouge soulignant qu'il eut dû se blesser,
Le cerf se baladait à l'extérieur du bois.

Échappant aux chasseurs qui voulaient le tuer,
Il s'était même enfui de sa propre forêt.
Laissant derrière lui ses petits apeurés,
Sachant que les fusils créaient de grosses plaies.
Pensant à sa survie, il a abandonné
Ce qu'il croyait, pour lui, être le mot "parfait".

Marchant seul sur la route, ayant perdu sa force,
Perdu ce qui comptait: sa femme et ses enfants,
En proie au désespoir, il sort de ces écorces.
Il s'écarte du monde et s'abandonne au vent.
Il n'ose même plus vouloir bomber le torse,
Sa vie étant détruite, il trébuche au tournant.

Revoyant sa famille dans un dernier éclair,
Il sort de cette route et va au précipice.
Il se présente seul sous une lune clair,
Effaçant d'un seul saut toutes ses cicatrices.

Pax

Colombe de la Paix

Qu'oseriez-vous donner pour que vive la Paix?
Pour que le monde entier se tienne par la main,
Que l'on stoppe les guerres et tous ces assassins,
Que feriez-vous pour ça, pour qu'ensemble on essaie?

Aujourd'hui ou demain, tous les peuples unis
Pour combattre les cris, pour tuer la Violence,
Pour que les pas qui fuient se changent en pas de danse,
Pour que l'on puisse enfin se battre pour la vie!

Vous sacrifieriez sûrement quelque chose,
Mais cela suffit-il pour un but aussi grand?
Cela est-il assez, serait-il suffisant?

En vue de l'idéal qu'est cette idée grandiose,
Un objectif fixé qui n'est que dans les livres,
C'est à se demander: Faut-il mourir pour vivre?

Bilan dans le sang

Paris

Ils étaient plus de cent, en cette fin de semaine, à sortir pour le plaisir.
Ils étaient plus de cent, en famille ou entre amis, à se balader dans Paris.
Ils étaient plus de cent, entre le théâtre et les restaurants, ou simplement dehors.
Ils étaient plus de cent, parents et enfants.
Ils étaient plus de cent, au mauvais endroit au mauvais moment.
Ils étaient plus de cent, cibles insouciantes.
Ils étaient plus de cent, victimes innocentes.
Ils étaient plus de cent, et pour quelques tarés, ils ne sont plus là.
Ils étaient plus de cent, cauchemar irréel.
Ils étaient plus de cent, sous les tirs et explosions.
Ils étaient plus de cent, des millions de souvenirs.
Ils étaient plus de cent, il ne reste que du sang.

Allons-y

I want to go far away

Si la vie nous a donné la chance de ressentir
Si l'on peut à tout moment décrocher un sourire
Si chaque jour de plus, nous pouvons découvrir
Pourquoi restons-nous, là, à regarder les autres?

Si nous avons les moyens de partir en voyage
Si après une défaite, on peut tourner la page
Si l'on peut éviter la colère et la rage
Pourquoi, ces rêves, ne pas les faire nôtres?

Si nos pensées se dispersent aux quatre vents
Si nos envies s'intensifient à chaque instant
Pourquoi rester calme et attendre son heure?

Si les nuages laissent apparaître le soleil
Si la lumière nous fait voir toutes ces merveilles
Pourquoi ne pas foncer et saisir ce bonheur?

Roi des cieux

Aigle royal

À regarder le monde et traverser les cieux,
À ne pas saluer ni faire des adieux,
De ton air menaçant, tel un chevalier preux,
Tu règnes sur le ciel, ne fuyant que le feu.

Tes plumes flamboyantes et brillantes au soleil,
Tel un Roi ressortant d'un conte de merveilles,
Tu es dans la tête d'enfants qui se réveillent,
Mais pourtant bien réel, tu les sors du sommeil.

En te voyant ils crient, mais ce n'est pas de peur,
C'est de l'admiration qu'ils ont à ton égard
Car ils ne peuvent voir l'absence en ton regard.

Aucun d'entre eux ne sait la tristesse en ton cœur,
Quand capturé un jour, tu fus fait prisonnier.
Toi, le grand Roi des cieux, n'as plus ta liberté.

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